Reconquête

Reconquête

Dit le Poète :

J’hâlai de péristyle les cristallines demeures, voguant sur une barque d’ivoire dont les flancs regorgeaient de nourritures moirées de songes, d’ivresse et de fortunes, mon équipage ardent scrutant l’Océan fulgurant, à la recherche de nos terres embrasées, oasis que la poupe irisait de magnificences et de splendeurs azurées, il y avait là un chant qui s’émondait et livrait sa prestance à nos yeux en majesté, aux vagues ourlées de nymphes égayées, transcendant un hymne dont le parcours infini embrasait et l’éternité et son harmonie, je n’avais d’autre sort que de pénétrer ce règne, et avec moi les voix des voiles dardées délibéraient l’écume et la houle propices pour éclore cette nuptialité, que nous fûmes en propos, sans repos au gréement des tempêtes qui se levaient, labourant notre sol d’ébène de vestiges armoriés, ici, là, des profondeurs issues, des étoiles ensablées aux devises qui nous contaient les flux et les reflux d’hôtesses messagères, ces civilisations perdues sous les assauts de la vanité, de la fronde et de la traîtrise, toutes voies ouvertes engendrant le renouveau qu’un calice d’émeraude portait, là, dans l’embrasement des cieux qui fustigeait les éclairs sombres des liens adventices aux ténèbres et aux abîmes, que nous franchîmes, par la hardiesse de nos cœurs palpitants pour revenir ces rivages que le plus jeune d’entre nous perçu, ici, par-delà l’ouragan et ses transports de lames adventices, alors que l’indivise nue nous menait vers sa anse qui lentement nous annonçait, sans que notre témérité soit conséquence, comme si, invisible, un fil d’Ariane advenait notre nef afflux des moiteurs des sèves qui, sillonnant l’espace et le temps, se conjuguent dans la pure incantation de la viduité souveraine, et nous fûmes ce sein, abordant l’oasis et ses sources, dans la calme attitude que sied l’aristocrate détermination, hissant notre pavillon d’Éden, miroir des stances qui baignaient, autrefois, de lys essaims nos terres ancestrales, ce jour souillées et éperdues par la faune glauque des clameurs jalouses et haineuses, il y avait là tout ce que la nature éblouissante peut donner, que déjà nous partagions, d’écume rangée notre nef, chaque membre d’équipage assumant sa sûreté, avant que de pénétrer plus avant sur notre terre sur laquelle nous nous réinstallâmes, vierge essaim semblait-il, aux ramures éperdues des cartes maritimes, que nous parcourions depuis des années, hissant les rythmes de notre civilisation en son sein dans la pluralité des cœurs et dans l’affinité des âmes, voyant s’établir moissons de colonies souveraines, marquant de leur qualité la noblesse d’une force composée délivrée de la mystique sordide de lois iniques résorbant l’humain à une simple larve corvéable à souhait par toute la fripouille acculturée qui sévissait au-delà de cet hymne nouveau, nous découvrîmes l’affront de cette nocturne désinence, ici quelques ilotes infantiles, dont l’excès toxique de lianes psychédéliques avaient refermé à jamais la faculté de l’intelligence, nous les laissâmes sur leur aire que nous ne troublions d’aucune volonté ni attachement, tant la puérilité et le désir de destruction étaient leur panoplie et leur étrange conception de vivre, eux-mêmes ne cherchaient à s’élever, préférant se rabaisser dans des rituels décomposés dont les orgies clamaient leur pauvreté intellectuelle, cette inintelligible constante née de l’oubli d’être, qui, se prenant pour maîtrise, devient le chant de mort pour chaque être humain, tant la médiocrité est son concept et la virtualité sa demeure, il ne nous fallut pas dix ans pour reconquérir ce que l’on nous avait spolié, la nature en ses flots grisants ayant par la mesure même de l’oubli de l’Être Humain ravagé l’enclos qui se voulait servitude, la servitude elle-même, tel Ouroboros, calcinée jusqu’au dernier les satrapes en tous genres qui voulaient féconder leur hymne de terreur, et les quelques rescapés qui accouraient ou tentaient de pervertir nos armées en lice, nous les oubliâmes dans les ténèbres qui les enlisaient, retrouvant de la composition de notre Chant la vigueur ancestrale ne se laissant dominer par les scories et leurs Alysée, ces vents trompeurs qui sentent la faune carnassière et la putridité, ainsi dans le chant des écumes alors que l’ordre dans sa pure éloquence précipitait dans l’abîme les mages noirs et leurs équipées sanglantes, toutes ces théories de fauves assoiffés de sang qui, cantonnées dans leurs terroirs usurpés lentement dans une agonie stérile quémandaient jusqu’à notre compassion, le sort en était jeté de leur infortune, de leur griserie comme de leur vanité, l’Humain ne serait pas leur pourceau, l’humain en ses floralies, ses puissances et ses aspirations à la grandeur, au dépassement du nombrilisme exaspéré de la lâcheté et de sa fortitude, il était tard pour leurs dévotions, leurs empyrée miasmatique qui tel le chiendent cherchait encore à luire dans la contrefaçon des valeurs les plus ultimes, ici désormais régnaient des Êtres libres n’aspirant qu’à l’élévation, ici désormais la qualification comme la capacité était récompense des pouvoirs, et aucune latrine en nos institutions ne déversaient le fiel d’un quelconque aréopage de belliqueux, de nocturnes, de jaloux et de haineux, nos terres étaient lavées de ces fétides appartenances afin de faire rayonner la puissance de nos écrins, comme rayonnaient désormais la puissance de chaque Terre purifiée de la pestilence avide qui avait cherchée, en vain, à rendre esclave les Peuples en semis, la viduité reprenait sa place, la Vie se parait de toute l’innocence qui avait été pervertie, et le don de soi exaltait une jeunesse qui regardait avec écœurement les principes qu’hier voulait imposer aux vivants, le parasitisme dans son impuissance, dans son désœuvrement et ses litanies qui ne trouvait nulle place en notre lieu renouvelé, messager de cette lumière souveraine qui n’appartenait à personne, mais à tous dans la connaissance, intime degré de l’éblouissement façonnant une civilisation bâtie sur l’inaltérable respect de la Vie et du Vivant en sa multiplicité, apaisant la faim comme la soif tant des chairs que des esprits et des âmes, dans ce sommet de la complémentarité substitué à cette chose si mal nommée l’égalité qui ne peut s’appliquer qu’aux droits et en aucun cas aux facettes multipliées du vivant, ainsi alors que se taisent sur les mers les caprices des venelles glauques, que sur les terres les drapeaux se hissent pour fêter la paix, la paix des âmes, des esprits et des corps, cette paix naturelle que rien ni personne désormais ne pourra détruire sous peine de se détruire lui-même, la paix des Êtres Humains et des Nations, la paix souveraine légiférant le droit inaliénable des Êtres Humains à naître à leur dimension comme à leur capacité majestueuses, ainsi alors que le soleil se couche, veille sans limite, et que demain verra l’Universalité composer pour hisser au-delà des avatars et des contractions temporelles, l’Humanité en ses floralies, au plus vaste degré qui soit, celui de la conquête de l’immensité qui se dresse devant ses yeux, et que jusqu’à ces derniers siècles elle ne pouvait voir, si tant courbée et en reptation devant les immondices et leurs féaux, ainsi alors que chacun s’endort dans la sécurité d’un monde qui ne doit qu’à la Vie son plus haut degré de perfection…

Ainsi dit le Poète…

© Vincent Thierry