Le combattant de la Voie

Le combattant de la Voie

 

Il n’y a lieu de s’interroger du devenir de ses actions pour le combattant de la Voie, il n’y a amertume à n’être rien dans le décor de la matérialité qui se réjouit, il n’y a désir de se voir applaudi, d’attendre une quelconque reconnaissance, car la Voie de l’esprit n’est pas ce chemin de la facilité auxquels succombent bien des égarés qui ne voient que renommée, la Voie de l’esprit est volition n’attendant des fruits de ses expressions, sinon le seul fruit qui s’instaure naturellement, l’éveil de la perception chez autrui, cette perception du réel autrement plus magnifique que la virtualité comme l’illusion qui sont les maîtres à penser de nos contemporains, éblouis par la vanité et ses décors de verroterie.

La création n’est pas composition mais sacerdoce, elle n’accueille en son sein le "je" mais le "nous", et en cela réduit ses vecteurs qui pour la plupart rejoignent la stérilité des opiacées dominantes dans ce monde pétri de matérialisme.

Ainsi à celles et ceux qui veulent chevaucher le tigre, vaincre le dragon, qu’ils ne cherchent chemin dans le Souffle de la Vie, s’ils veulent voir briller leur "je", dans les impérities de la vacuité et l’ordinaire samsa, ici, en ce lieu il n’y a de place pour les lâches et les reptiles, les fourbes et les hypocrites, il n’y a de place pour l’atrophie et la mutilation des esprits, il n’y a de place que pour celles et ceux qui ont pour but la connaissance, qui sont tout à la fois l’arc et la flèche, et qui armés de cette force enseignent afin de tétaniser l’ignorance et la voir refluer sur son chemin de poussière.

Sacerdoce ce chemin l’est plus que d’autres, car il est Voie du silence de soi comme oubli de soi, il est don et ne s’ordonne ni ne se conjugue, il est au-delà de la somme des parties, catharsis du réel, et son témoignage ne peut que remplir de peur celle où celui qui recherche prébende, gloire, notoriété. Il n’y a rien ici de tout cela, il n’y a qu’action pure, ne recherchant ni prestige, ni glorification, une action qui n’a besoin de s’autoriser pour illuminer, une action ne recherchant ni profit, ni congratulation, son autorité naturelle se suffisant à elle-même.

Pierre angulaire de cette action, on l’aura compris se tient ici le don, non pas l’aumône, mais le don total de son énergie à la destination de la Voie qui veut l’élévation et non la reptation, qui veut l’ascension et non la dégénérescence de la Vie. Ainsi se révèle le combattant de la Voie, chevalier des temps, samouraï inscrivant sur la page vierge le devenir, perception et préhension, concaténation et navigation, non par vanité mais pour éveiller, éveiller seulement, permettre à l’Être Humain de sortir des ornières de la Voie inversée, cette mythologie de la décadence qui le précipite vers le néant, aréopage du burlesque, du mensonge, de l’ignorance, servi par des pseudos philosophes, des pseudos scientifiques, des pseudos artistes dédiés à l’illuminisme, dévot de Thanatos.

Ainsi le combattant de la Voie, Vajra de la Tradition, qui se tient debout dans ce monde couché afin d’en signifier le sens et en obérer les miasmes pour restituer à la Voie sa densité et son ascension. En conscience il n’est atteint du samsa et de ses perversions, imperméable aux sinueuses imperfections, insensible aux reptations, debout sous la pluie, sous l’orage, sous le feu solaire, sous la violence des vents, sous les astreintes des terres, sous les cris de haine ou d’adulation, imperturbable il fixe l’horizon du devenir Vivant et participe à son équilibre dans le sens de la Voie Ouranienne et Solaire, et dans l’Ordre de l’égrégore qui est parturition des mondes, initie cette Voie vouée à l’élévation Humaine par toutes faces de la Vie.

Qu’ici l’impétrant se pose la question de sa participation, cette question est déjà errance, car il n’est de lieu, de temps, dans l’accomplissement et il n’est nécessaire de se connaître où de se réunir pour accomplir, la Voie de l’Esprit se suffisant pour se coordonner et évoluer. Liberté ici est force maîtresse, et cela n’est un hasard mais une pure nécessité, ainsi s’il arrive qu’une branche fût coupée, rien de l’action engendrée par cette disparition ne grève l’action elle-même, ses ramifications s’étendant à l’infini, inidentifiables, car parties de l’ensemble des systèmes existants, inexistants car agissant dans la solitude même qui sied aux Vajra, impénétrables, car transcendance d’une identité Humaine et non d’un ensemble d’Êtres Humains. Ainsi dans la multiplicité des temps se meut le combattant de la Voie.

© Vincent Thierry