Regard

Regard

 

Sapience des âges de la nuit, d’ivoire aux azurs florilèges, qu’irisent le sort et ses diurnes opiacées qui rêvent, ce monde se grée d’infortune, de talismaniques errances, de fauves délétères, et de ces jeux sans lendemains qui se veulent d’amour les correspondances, intimes convictions effarouchées au vol des oiseaux lyres qui parlent aux vivants, et ne répondent aux errements qui se stigmatisent, s’embellissent, s’enhardissent, mais toujours échouent sur le calvaire des méprises, de ces stances sans vêtures qui crient leur indolence, s’enrobent dans d’ignares servitudes et se congratulent dans l’absence, mièvreries des adages qui s’avortent, s’enrubannent de satisfactions sans espoirs, nervures d’espèces en voie de disparition qui se contemplent, s’abreuvent, s’épanouissent puis disparaissent dans les nuées abyssales d’une consommation tardive.

Ainsi ces routes où l’ombre perle la paresse, l’empreinte du néant et ses gloires additives, des fêtes sans semis, sans ordonnances, poisons des jours en écueil, dessinant aux limbes éthérés ces miasmes qui s’enfantent, ces couronnements de la déréliction qui se veulent triomphes, tout faste de l’introversion qui farandole aux écumes des pouvoirs, en services commandés pour attrouper le médiocre et l’inconscient, des théurgies de l’ignorance les troupeaux qui officient, pauvres errants aux atrophies conditionnées qui se parodient à l’infini d’une trivialité moribonde qui se parle sans répond, sinon celui des larves agenouillées.

Ici on se prendrait au mépris si le mépris lui-même n’était un signe de faiblesse, et la question qui vient : "comment sortir ces êtres de leur néant ?", y a-t-il seulement un espoir de les voir se relever de cette dysfonction qui les fait traire par l’absurdité, l’affliction, l’indétermination ? Comment réveiller leur aptitude créative ? Le sens ici trouve sa légitimité, car il serait facile de les laisser croupir dans les immondices qui les entraînent, et de se dire qu’ici il n’y a plus rien à faire, que cette partie de l’humanité, non-humanité par excellence, se réjouissant de ses propres déjections, doit être laissée pour compte.

Cette facilité là reste sans intérêt face à la renaissance qui se doit, et qui ne doit laisser pour compte un seul représentant de l’humanité en dehors du vivant, car fut-il éteint en ses semis que veille la flamme originelle en son sein, qu’il suffit de raviver pour qu’elle éclaire à nouveau l’avenir et ses horizons limpides. Ici le lieu, ici le temps, et dans ce lieu et dans ce temps chacun d’entre nous se doit de révéler l’autre à sa densité, à cette préciosité lumineuse qui ne se perd dans les litanies de l’absence, mais bien au contraire, mûrie, développe la portée de toute préhension comme de toute compréhension, loin des subterfuges qui s’idolâtrent, loin des ramures équinoxiales qui cachent la réalité sous des bûchers de vanité, loin de la stérilité et de ces ivoires dénaturés qui comblent d’abstractions les univers décomposés de la déchéance, loin de l’incongruité et de ses rives démasquées, loin de ces funèbres processions qui s’alimentent d’indicibles torpeurs où la mort ricane.

Ainsi alors que les troupeaux s’émeuvent des phasmes qui les autorisent, que grouillent en palinodies les éructations provocatrices de la lie et de ses féaux, ces parasites décervelés qui s’imaginent nourriciers d’un quelconque avenir.

Ainsi alors que les alarmes vocifèrent dans ce monde devenu babélien, où plus rien n’est rien, sinon qu’une rustine qui sert à colmater la débauche gargouillant du parasitisme institutionnalisé, celui d’étrons galopants qui viennent traire les avoirs des Peuples en gémissant, celui de quelques-uns qui au nom d’un système économique en faillite implorent les impôts des esclaves de demain, apatrides sans racines mues par le rien faire, le profit des autres, ces autres qu’ils méprisent, ces autres qui les enrichissent soit dans la pauvreté factice soit dans la richesse infinie, opium des foules martelées par les mots d’ordre de cette saturation de la liquéfaction, cette bestialité accouplée à un seul but, celui de paraître, d’apparaître et dans l’illusion du pouvoir, qui se mérite, de diriger ce monde à son image, un monde de néant, bubonique par excellence où la pourriture se glorifie, où la vermine grouille, où l’infect est le ruissellement théurgique de lois iniques, toutes dévouées à la mort.

Celle de l’Être physique par avortement, euthanasie, celle de l’Être pensant, par défiguration et réécriture de l’Histoire avec un H majuscule, celle de l’Être Spirituel qui doit de compromission en compromission se noyer dans la soumission la plus ignoble qui soit, celles de l’Être Humain, qui doit disparaître au profit du non-humain, sous animal enchanté, sous animal adulé, sous animal proclamé qui acclame son esclavage avec jouissance.

Ici se situe le combat à naître, celui de la renaissance à l’Humain, actuellement sous animal conditionné, qui n’a plus racines ni Histoire et qui se perd dans les lamentations délétères de sa propre défiguration afin de s’accorder à la répugnance qui se veut dominante mais dont l’arrogance la perdra définitivement dans l’abîme de sa propre violence outrageante tant pour les Êtres Humains que pour l’Humanité !

© Vincent Thierry